
Avec À rebours, initialement publié en 1884, le romancier français Joris-Karl Huysmans (1848−1907) rompt avec le romanticisme d'Émile Zola pour épouser une nouvelle esthétique symboliste. Dépourvue d’intrigue, la narration se focalise sur le personnage principal, Jean des Esseintes, antihéros esthète, dandy et excentrique qui rejette la modernité et cultive des goûts décadents. Après avoir mené une vie agitée et exubérante, las du monde, il se retire dans un pavillon de banlieue à Fontenay-aux-Roses, où il collectionne ce qu'il considère comme les ouvrages les plus précieux et les objets les plus rares, se consacrant à l'oisiveté et à l'étude. Il crée des parfums raffinés et un jardin de fleurs vénéneuses. On peut voir dans la tortue qui meurt sous le poids des pierreries incrustées par des Esseintes dans sa carapace une métaphore du destin du héros du livre. Des Esseintes ne parvient pourtant pas à s’arracher à sa fatigue existentielle. Renonçant à cette vie, il rentre à Paris. L’esthétique fin de siècle créée par Huysmans fut considérablement influencée par Charles Baudelaire, Edgar Allan Poe et Stéphane Mallarmé, ainsi que par la peinture de Gustave Moreau et d’Odilon Redon. À rebours devint le manifeste de l’esprit de décadence dans lequel se reconnaîtra toute une génération d'intellectuels et d'artistes français. L'ouvrage présenté ici, exemplaire d'une édition qui n'en compta que 130, inclut 220 gravures sur bois en couleur d'Auguste Lepère (1849−1918), un des plus grands peintres, graveurs et illustrateurs français.