![Cosmographie]()
L'astronome, mathématicien et géographe grec Claudius Ptolemaeus (100–178 env.), connu sous le nom de Ptolémée, fut théoricien du géocentrisme. Il rassembla ses travaux sur la géographie dans
Geōgraphikḕ Hyphḗgēsis (Introduction à la géographie) en huit volumes. Cet ouvrage, considéré comme la somme de toutes les connaissances géographiques du monde gréco‑romain, fut largement dédaigné en Occident durant le Moyen‑Âge. Il doit son retour en grâce à l'humaniste byzantin Manuel Chrysoloras (1350‒1415), qui le fit connaître en Italie. L'un de ses disciples, le Florentin Jacopo di Angelo da Scarperia (ou Jacobus Angelus de Scarperia), le traduisit du grec en latin et l'intitula
Cosmographia. Il dédia sa traduction au pape Alexandre V. Des copies des manuscrits de Ptolémée furent jalousement conservées dans les plus belles bibliothèques d'Italie et d'Europe. L'exemplaire présenté ici est une copie réalisée à la cour de Borso d'Este (1413‒1471), à Ferrare, lors de la seconde moitié du XV
e siècle par le moine bénédictin allemand Nicolaus Germanus. Les planches de l'ouvrage sont préfacées de brèves descriptions. Les cartes sont dessinées selon la technique de projection conique, entourées de coordonnées géographiques et encadrées d'une frise dorée. Les étendues d'eau, les montagnes, les plaines et les forêts sont restituées dans des couleurs différentes et particulièrement éclatantes : bleu, terre de Sienne, blanc et vert. Le planisphère du monde tel qu'on l'envisageait à l'époque, au centre de l'ouvrage, est un trait marquant de ce dernier, avec ses représentations anthropomorphiques des vents sur fond d'aquarelle délicate bleu azur. Les ornements et les enluminures du codex sont l'œuvre d'un artiste florentin ayant pu faire partie de l'école de Francesco di Antonio del Chierico (1433‒1484), l'un des enlumineurs les plus raffinés de la Renaissance à Florence. Une illustration de Ptolémée plongé dans ses calculs figure dans les premières pages du manuscrit. Dans le monde occidental, ses travaux ne souffrirent d'aucune concurrence pendant près de deux cents ans, de nombreuses éditions imprimées ayant été publiées dès la fin du XV
e siècle et durant le XVI
e siècle. La traduction latine de Jacopo di Angelo da Scarperia parut pour la première fois en 1475, alors que le texte grec original ne connut sa toute première édition, réalisée par Érasme de Rotterdam, qu'en 1533. La publication d'atlas modernes, qui débuta en 1570 avec le
Theatrum orbis terrarum (Théâtre du monde) d'Abraham Ortelius, finit par reléguer les travaux de Ptolémée à de simples témoignages de l'état des connaissances des Anciens en matière de géographie et d'astronomie. Ce manuscrit fait partie de la collection Farnèse, arrivée à Naples en même temps que Charles III, de la maison de Bourbon, roi d'Espagne et conquérant de Naples en 1734, qui avait hérité de sa mère ces objets d'une valeur inestimable ayant jadis appartenu au pape Paul III.