
« Je flambais, je me hâtais, comme les gens qui doivent mourir jeunes et qui mettent les bouchées doubles » : cette phrase dite par un des personnages de Raymond Radiguet pourrait s’appliquer sans peine à son auteur. En trois ans, Radiguet (1903–1923) publia trois articles, des poèmes et des romans, dont Le Diable au corps, qui fut un best–seller et devint un classique. Le Bal du Comte d’Orgel, présenté ici, fut son second roman. Rédigé dans un style qui rappelle le XVIIIe siècle, il raconte les émois de François et de Mahaut, mariée au comte d’Orgel, qui peu à peu tombent amoureux l’un de l’autre. Franche, Mahaut avoue ses sentiments à son époux, pour qui seul importe le scandale éventuel. Cherchant à éloigner de lui « les angoisses du cœur », il propose un arrangement qui, sans le savoir, éteint toute vie chez sa femme. La dernière phrase du livre : « Et maintenant, Mahaut, dormez ! Je le veux », ordre donné par le comte, est emblématique de cette histoire. Radiguet décrivit son roman, où abondent les références aux grandes œuvres du passé telles que Tristan et Yseult et La Princesse de Clèves, comme un « roman d’amour chaste, aussi scabreux que le roman le moins chaste ». Emporté par la typhoïde le 12 décembre 1923, Radiguet n’en verra toutefois que les épreuves d’imprimerie. Le Bal du comte d'Orgel fut publié l’année suivante par l'éditeur français Grasset.