
Ce manuscrit nord-africain datant de la première moitié du XVIIIe siècle est un livre de prières intitulé Wardah al-juyūb fī al-ṣalāh 'alá al-Ḥabīb (Recueil de prières pour le prophète Mahomet). Les prières pour le prophète Mahomet occupent une place particulière dans la vie dévotionnelle musulmane. Elles furent d'abord inscrites dans le Coran : le verset 56 du chapitre 33, al-Aḥzab (Les coalisés), déclare aux musulmans « [qu'] Allah et Ses anges prient sur le Prophète » et demandent aux croyants d'en faire de même. Dans leurs discours, introductions de livres ou autres, les dévots musulmans commençaient souvent par une prière de ce type pour bénir ce qu'ils allaient faire, mais ce fut seulement à la fin du IXe siècle que ces prières devinrent un genre à part entière. Le premier ouvrage qui leur fut exclusivement consacré aurait été Faḍl al-ṣalāh 'alá al-Nabī (La vertu de la prière pour le Prophète) du juge malikite Ismaa'iil ibn Ishaq al-Jahdami (815 ou 816−895 ou 896). D'autres livres de prières suivirent, dont le célèbre Dalā'il al-khayrāt (Le guide des actions charitables) de Muhammad ibn Sulayman al-Jazuli (mort en 1465). Au milieu du XIVe siècle, ce genre était particulièrement populaire dans la région de l'actuel Maroc. L'imam Ibn Marzuq, qui vécut durant le règne du sultan marinide Abu Al-Hassan 'Ali ibn 'Uthman (1331–1351), remarqua que pendant les célébrations de la naissance du prophète Mahomet dans les terres marinides « les prières pour le Prophète étaient à leur paroxysme, merveille dont on pouvait être le témoin au Maghreb ». L'ouvrage, en écriture maghrébine, est un recueil de fragments choisis par 'Umar ibn 'Abd al-'Aziz al-Jazuli dans Dalā'il al-khayrāt et dans une deuxième œuvre intitulée Riyāḍ al-anwār (Les jardins des lumières) d'un autre auteur de Jazuli, qui demeure par ailleurs inconnu. Le manuscrit contient une longue introduction mentionnant les récompenses spirituelles associées aux prières, suivie de 42 prières, dont la longueur varie d'une phrase à quelques pages, écrites sur papier épais vergé crème, comportant des vergeures à peine visibles. Le scribe, Mukhtar ibn Muhammad, nommé dans le colophon, utilisa de l'encre noire avec une rubrication. Certains titres et rubriques sont écrits à l'encre dorée, brune ou verte. Les réclames apparaissent au recto des pages. Le manuscrit, enluminé de plusieurs motifs géométriques de la taille d'une page, est richement embelli de panneaux multicolores appelés 'unwan. Les feuillets 12b et 13a comprennent des illustrations se faisant face, encadrées de bordures décoratives. L'intérieur d'une mosquée est représenté sur le feuillet 12b, avec deux plates-formes dorées menant vers une plate-forme plus grande sur laquelle repose un récipient contenant des fleurs. L'illustration du feuillet 13a représente des marches montant jusqu'au minbar (chaire), à gauche.